Conte du Vietnam – Le chant miraculeux

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Le chant miraculeux

Il était une fois, un puissant seigneur ayant pour fille unique une pure beauté. Elle se prénommait My Nuong. Comme toutes les jeunes filles de son rang, elle vivait cloîtrée dans son palais. Elle consacrait tout son temps à la peinture, la broderie et la poésie. Parmi ses distractions, elle aimait se mettre à la fenêtre de sa chambre pour admirer le paysage et regarder l’eau du fleuve s’écouler en contrebas.

Un beau jour, elle entendit un chant mélodieux et mélancolique qui montait de la rive. C’était la voix d’un pêcheur qui tirait son filet. Chaque jour, avant le lever du soleil, elle pris pour habitude d’écouter cette voix qui berçait si harmonieusement les méandres de son âme.

Un beau matin, la voix se tut. Le silence s’installa. Elle tomba alors gravement malade. Aucun médecin ne parvint à déterminer la cause de son mal. Puis, un jour, la voix s’éleva de nouveau. Ce chant était si pur et si mélodieux que My Nuong reprit ses forces et retrouva sa beauté. Elle redevint heureuse au soulagement de son père. Cependant, chaque fois que la voix se taisait, elle replongeait dans une léthargie désespérée. Intrigué par ces soudains changements d’humeur, le seigneur observa sa fille et découvrit la raison de sa fragilité. Il fit rechercher l’individu à la voix miraculeuse et le fit amener auprès de sa fille alitée.

Mais, à la vue du pauvre pêcheur, My Nuong, effrayée par sa laideur, le fit mettre de suite à la porte du palais. D’un coup, le charme de la voix fut rompu. My Nuong effaça de sa mémoire le chant mélodieux qui l’avait tant séduite et reprit une existence normale.

Il en fut tout autrement pour notre pêcheur, Truong Chi. Celui-ci menait jusqu’à présent une vie paisible. Il n’avait aucun souci autre que celui de pêcher suffisamment chaque jour pour subsister.

Le fameux jour où il rencontra pour la première et unique fois la belle et gracieuse My Nuong, il en tomba fou amoureux. Ce jour là, il fut aussi terriblement blessé par la réaction de cette dernière à sa vue. Il savait qu’il était bien laid et trop pauvre pour espérer susciter le moindre sentiment de My Nuong envers lui. Il commença alors à négliger son travail. Il tomba malade et se laissa mourir. Son corps fut enterré près d’un arbre, au bord du fleuve, là où il avait pour habitude de pêcher.

Quelques années plus tard, lors d’une crue violente, les berges furent ravagées par le fleuve. La tombe de Truong Chi fut dévastée. Et on trouva, tout près de l’arbre, une grosse pierre de jade d’une pureté magnifique. Selon les gens du coin, il s’agissait bien du corps du pêcheur que le temps avait transformé.

Cette pierre splendide arriva entre les mains du père de My Nuong qui réussit à l’acheter à un prix d’or. Il la fit tailler en forme de tasse et l’offrit à sa chère fille.

Dans sa chambre, quand celle-ci versa du thé dans le précieux objet, elle vit apparaître, tout au fond, le visage de Truong Chi. Et soudain, résonna dans la pièce, la voix mélodieuse, qu’elle avait tant aimé. Émue et prise de pitié, My Nuong commença à pleurer. Ses larmes tombèrent dans la tasse qui par enchantement se désagrégea et disparut. L’âme du pêcheur fut ainsi libéré de son désespoir grâce au sentiment de compassion que My Nuong avait enfin exprimé à son égard.

Originally posted 2011-05-16 11:01:50. Republished by Blog Post Promoter